Toro !
La Catalogne olivée
avait des églises et Gaudi…
Barcelone pour Soleil,
et pour l’ombre
la frange des Pyrénées.
Et puis pour se baigner,
de l’eau troublante
Au-dedans de sa Grand’ Mer claire :
une baignoire Méditée… où des odeurs rôdent…
Des odeurs d’arrière-boutiques à corridas…
sur des sables maculés de brun.
OLÉ ! TAUREAUX : LA MORT !
Ils ont le manche à fleur de peau
Et trouent les vaches,
LES TAUREAUX.
Leurs cornes, des masses fourchues,
Bardent leur front d’armes pointues !
Dard(e)nt sur le front leur fer pointu !
Les taureaux percent les culs des moutons bêlants
Et foncent dans les corridas pourfendre les drapeaux.
S’enfoncent jusqu’au gras de rouges oripeaux !
Puis ils se font rincer
La couenne à ras l’oreille,
À ras la queue – à ras !
Pire ! ils se font raser
À ras la couenn(e), l’oreille ;
Araser la queue – ras !
OLÉ ! PICASSOTORO-MACHO !... EN PEINTURE LA MORT
I
Holà !, taureau !... La guerre fait de beaux tableaux
- De ces grandes batailles ! –
Quand s’entremêlent les pinceaux de Paolo
UCELLO !, les murailles
Dans les cerveaux de LEONARDO DA VINCI
Et MICHELANGELO
BUONARROTI !... Mais… : PICASSOTAUROMACHIE !
Pour toi, Taur-ô-bello !
II
Pourvoyeurs d’étymologiques hécatombes
Drapées de capes rouges,
Les fumiers de la corrida ont accouru,
Empesés dans leurs frocs ;
Colorés pour la pompe en de louches salopes
- Des bouchers ridicules !
La verge enfin gonflée et prête à s’émouvoir,
Ils banderill(e)nt, nerveuses,
Sous les « Olé ! » d’une foule FRANCO-de-porcs ;
Lors s’échauffent les couilles !
Par endroits du sang gicle : un cheval encorné,
Un picador qui meurt
En se brisant le col, la langue dans le sable
Dur de la piste ovale,
Cette plazza qui n’est pas la douce agora
Où marchaient des idées !...
Et la foule se dresse : « Olé !!! Olé !!! Olé !!! »
Et le taureau s’affale !
*
Il est beau, emplumé de papiers de couleur
Rendus gras par le sang
Que sa gorge et ses flancs
Déversent sur sa peau !... Ses yeux mouillent de pleurs ;
Et la vue du coiffeur, là pour raser sa couenne
- À ras l’oreille, à ras,
Araser la queue, ras ! –
Avant son dernier souffle agite un peu sa panne.
TAUREAU
Te souviens-tu ?
Là ! dans l’arène
Ta tête en fer
Tirait du rouge
Lambeaux de drap
Morceaux de chair
Te souviens-tu
De ton oreille ?
Et de ta queue
T’en souviens-tu ?
De tout ce fer
Là dans ta chair
Qui te mordait
Du sang qui coule
Des cris sur toi
Et puis de l’homme
Qui s’agitait
Et ridicule
Voulait danser
Voulait danser
Te souviens-tu ?
La catalogne olivée
avait des églises et Gaudi…
Barcelone pour Soleil
et pour l’ombre
la frange des Pyrénées.
Et puis, pour se baigner,
de l’eau troublante
dans sa Grand’ Mer claire : une baignoire Méditée…
où des odeurs rôdent… Des odeurs d’arrière-boutiques
à corridas… sur des sables maculés de brun.
Dans ces arrière-boutiques-là se pressent des taureaux.
Leurs fronts hérissés, leurs sabots, frappent le sol dur
qu’ils voudraient bien pouvoir rêver vallée. Marre du
cauchemar !... où des voyous agitent d’immenses éventails
- et s’il en est qui éventent, il en est d’autres qui
éventrent ! Des voyous corsetés de rose et d’or, tapissés
de dentelle. Des voyous assoiffés de la Geste Précieuse
quand aboient les olé. Des danseuses assassines !
Marre du cauchemar…
Le mufle baise l’herbe grasse des vallées.
Philippe Baudet