C’est le Vent… I
C’est l’essaim qui poudroie en neige… en plein été
Avec l’accordéon ;
Un blanc sein qui se signe et teinte de salive
La lumière-néon
Du bel arbr(e) qui vacille dans le pré, tété
Comme la Madelon ;
Tant, qu’en ruisseau de lait il redresse sa rive…
Pour couler tout du long !
Dans la main cela sent si bon que l’on se pique
Au jeu… Et l’on caresse
Ces insectes-si-doux qui prennent forme exquise
En dessinant des esses :
C’est le sein qui ondoie, qui sous la paume épique
Flattant la courbe épaisse,
Paraphe d’un blanc-seing le Vent « dans l’cou », la bise ;
Léchant aussi les fesses !
C’est le Vent… II
C’est l’Attila-furieux qui va foulant les lis ;
Qui fait plier le chêne et brise les roseaux
À la base ; les taille… au son des Flûte(s)-Oiseaux !
C’est aussi le typhon qui s’envoie tous les plis…
De la mère des mères : la Mer !
C’est le Vent qui rougit, penché sur le coteau ;
Qui sous le cep ployé frôle le ventre-terre ;
Qui de ses doigts noueux lui caresse la peau…
Lui qui, libr(e), livre Bacchus aux dents des Enfers ;
Où seront traqués… vins et festins !
APOSTROPHE
(C’est le Vent... III)
Le Vent se découvre en levant vos chapeaux ;
Vous le voyez rugir, ou mugir… c’est selon ;
Il vous flagelle, le Vent, il vous soupèse…
« Souffle, Vent, jusqu’au fond des abîmes ; rougeoie et ronge. Et range les bonshommes. Charge, Taureau, comme dans l’arène. Boursouffle ton corps dans les drapeaux : qu’ils giflent et giclent sur les mers ; ou bien sur les places, à flanc d’Hôtels de ville et autres Palais officiels…
Souffle, Vent, et serine ton chant à l’oreille de tous et des sirènes. Éructe, mon vieux, vomis, ou mieux : tourne le dos à ces moulins qui t’attendaient pour broyer – salauds !
Plane avec l’oiseau, comme un oiseau, dans la dentelle – juste un baiser ; et dans les blés.
Plisse de l’eau la peau, à peine, qui frissonne… Un friselis…
Car il te faut parfois, Vent, camoufler ta colère ; mettre ton loup, ce masque d’agneau au visage si doux…
Alors, dans ces moments-là, Vent, coule ton air dans la musique ; dans ces roseaux où les trous sont des notes : étourdis-nous ; mens-nous ; caresse-nous… »
(Philippe Baudet, 1994-1999)