La Nuit (Souviens-toi de la Dame blanche - flot percussif) : Philippe Baudet, 2014

Posté

(Hommage à la grande et belle Maison : qui fut des années durant mon refuge, et… mon laboratoire)

 

IL ÉTAIT UNE FOIS… « LA NUIT »

 

 

En 2014, j’ai entrepris de faire La Nuit. C’est-à-dire composer, à une époque où je n’écrivais plus sur partition, (ce depuis 2012, et jusqu’au début de l’année 2016… qui me verrait reprendre le crayon et le papier à musique), une vaste pièce sur La Nuit.

Je vivais alors à la campagne. Et je travaillais souvent pendant la nuit. Dans mon atelier, peignant ; ou dans mon bureau, écrivant.

La Nuit. Avec ses bruissements singuliers ; et ses cris. Les rapaces : hiboux, chouettes, et tout particulièrement nos chères Dames blanches, ne faisant pas dans la dentelle : ces fauves des airs engloutissaient cul sec dans leurs becs des petits animaux… surpris dans leur sommeil ; ou bien les chopaient sans pitié entre leurs serres (vlouf !). Et ces petits animaux là poussaient alors des cris déchirants. Poussaient des plaintes. Des gémissements. Émettaient des couinements… zébrant la nuit d’un trait… de plume ! La musique de la nuit, en somme. Tragique donc.

Le vent, lui aussi, animait le prétendu silence nocturne propre à la campagne. La bise et l’orage parfois s’épousaient. Hululaient à tout-va. Enlacés. Amples rideaux d’eau qui claquent sèchement, tels des tapis que l’on bat, quand on fait les poussières. Traits de pluie, serrés drus. Fouettés, et fouettant sauvagement. Grêle. Grêlons. Gouttes qui par milliards cliquètent bruyamment en tombant sur le sol. (Là où l’herbe ne repousse plus… Après qu’Attila fut passé, tout ensanglanté du sang des autres.) Bourrasques-Attila. Ça claquait dru sur les ardoises du toit, ainsi que sur le goudron de la route qui jouxtait la maison, route qui continuait son chemin… sinueux sacrément.

Cela dansait aussi. Cela dansait, ici. Oui. Cela swinguait follement… En virevoltant crescendo. De jour, comme de nuit. (Tel un Gene Kelly pour le coup. Un Gene Kelly chantant sous la pluie : « Singin' in the Rain ! » Un Gene Kelly chantant à tue-tête, en tenant à la main… son inutile parapluie. Un Gene Kelly chantant donc, et dansant avec la même fougue, claquettes battant le pavé, un Gene Kelly sautant comme un fou à pieds joints dans les flaques, un Gene Kelly aspergeant tout sur son passage, même le flic qui vient à lui… voir un peu de quoi il retourne : « Z’avez-vos-papiers ?! »)

La cime des arbres. (Majestueux chez nous.) La robe des arbres. La peau des arbres. Les longs bras et les longs doigts des Grands Arbres. Nos Grands Arbres. Les nôtres. Le feuillage touffu de notre hêtre, de nos tilleuls, de nos marronniers. (Pardon, à ceux que j’omets, faute de place, de citer sur cette feuille de papier. Pardon, chères âmes.)

Les frondaisons des arbres, cinglaient quelquefois l’air. Méchamment.

Masses végétales portées par la bourrasque. Et ployant, agiles malgré un volume et un poids XXXXLLLL, leurs si beaux corps. Déployant leurs ailes de géants albatros. Des albatros géants déclamant du Baudelaire à tout-va. De l’Edgar Allan Poe. (CORBEAUX !) Jusqu’à se faire entendre, à l’intérieur. Et le jour, et la nuit. Brrr… À glagla !

Le tonnerre rugissait lui aussi, via les cheminées, ce dans toute la maison.

Cela vibrait à tous les étages.

Diable ! La maison. Ding, dong ! Ma maison

 

Et voilà.


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Voici, malgré tout, comment j’avais alors établi le programme sur l’une de mes esquisses, la première je crois :

 

1 : Ouverture. Thème pour La Nuit-15

2 : Thème pour La Nuit-17

3 : Souviens-toi de la Dame blanche (flot percussif 7)

4 : Final. Thème pour La Nuit-14