LE VIN : Philippe Baudet, 2019

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L’Âme du vin

(Poème de Charles Baudelaire, in Les Fleurs du Mal, 1857)

 

Vers 1990, j’ai écrit une première musique sur Le Vin (ou L’Âme du vin), dans mon second cahier de musique. Celle-là même qui me servira de base, bien plus tard, vers 2018 et plus récemment, pour mes versions orchestrales.

 

En 2012, ou peu après 2012, sur mon petit dictaphone de poche j’ai enregistré au moins deux a cappella sur le même thème – pas forcément avec les mêmes notes soit dit en passant. J’en ai retrouvé deux dans mes archives audio, ce par le plus grand des hasards, mais il y en a peut-être d’autres encore ? Car j’ai tout plein d’études audio qui sont « sans titre », dans ma caverne d’Ali Baba, tout plein d’études audios simplement accolées de chiffres, que je n’écoute jamais donc, puisque je ne sais pas de quoi il s’agit. Ou alors, à certaines (rares) occasions. (C’est ainsi que dernièrement j’ai eu la surprise de (re)découvrir des poèmes sur lesquels j’avais fait des essais vocaux – en oubliant depuis que j’avais fait cela.)

 

Bref. Je voudrais vous proposer maintenant trois de ces versions audio sur ledit poème de Baudelaire, que j’ai réalisées jadis ou naguère : un a cappella donc, simple étude vocale de 2012, puis deux versions instrumentales. (Deux sur… maintes variantes.)

 

Je ne peux le faire cependant qu’en trois fois, hélas, puisque je ne puis tout mettre dans un seul et unique article. Veuillez m’en excuser…

 

 

 

Philippe Baudet, le samedi 15 avril 2023


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L’âme du vin

 

 

Un soir, l’âme du vin chantait dans les bouteilles :

« Homme, vers toi je pousse, ô cher déshérité,

Sous ma prison de verre et mes cires vermeilles,

Un chant plein de lumière et de fraternité !

Je sais combien il faut, sur la colline en flamme,

De peine, de sueur et de soleil cuisant

Pour engendrer ma vie et pour me donner l’âme ;

Mais je ne serai point ingrat ni malfaisant,

Car j’éprouve une joie immense quand je tombe

Dans le gosier d’un homme usé par ses travaux,

Et sa chaude poitrine est une douce tombe

Où je me plais bien mieux que dans mes froids caveaux.

Entends-tu retentir les refrains des dimanches

Et l’espoir qui gazouille en mon sein palpitant ?

Les coudes sur la table et retroussant tes manches,

Tu me glorifieras et tu seras content ;

J’allumerai les yeux de ta femme ravie ;

À ton fils je rendrai sa force et ses couleurs

Et serai pour ce frêle athlète de la vie

L’huile qui raffermit les muscles des lutteurs.

En toi je tomberai, végétale ambroisie,

Grain précieux jeté par l’éternel Semeur,

Pour que de notre amour naisse la poésie

Qui jaillira vers Dieu comme une rare fleur ! »

 

 

 

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1857