SILENCE DANS LA RUE…
(Les voyages du diable)
Silence dans la rue… ; poussière de lumière
Blême des astres ; lune ; et maigre réverbère…
Sous le soulier vernis et qui craque mais luit
Tout de même, c’est le « mac-à-dam(e)s » dans la pluie…
On est au dix-neuvième, ou tout début vingtième ;
Tout est noir, tout est gris, et c’est la fin d’un monde :
ON EST AU CINÉMA !... ; on est, là, dans la ronde
Morbide des sabbats, quand des corps mous s’y aiment !
SILENCE DANS LA RUE – à peine un brin de pas !...
Poussière de lumière… à blêmir, quant aux crimes
De l’ange Lucifer…, lui, le PORTEUR D’APPÂTS…
Silence dans la rue, avant que ne s’escriment
LA LAME AVEC LA CHAIR…
(Philippe Baudet, 1990)
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Approchez !
Approchez, approchez, messieurs, mesdames, et vous aussi mesdemoiselles…
(Stop ! Pas vous les enfants ! : z’êtes trop petits !, trop tendres. Votre esprit est bien trop vert. Ceci, cette… heu… « chose-qui-griffe-et-mord » est réservé aux grands – d’au moins 12 ans ! … C’n’est pas pour vos yeux innocents, tous ces flots et ces flots d’hémoglobine, à donner le cauchemar ! C’est pour, c’est pour… hé, hé… Hem, hem… les… amateurs… de frissons !
Allons. Au lit ! Fissa ! Et que l’on ne vous voie pas écarter le rideau, hein ! Entrebâiller la porte… Reluquer par le trou de la serrure, garnements ! Petits sacripants ! Ohé !, chenapans… Z’êtes sourds ou quoi !
Hé !... Qu’est-ce qu’tu fais là petit, dis ? Oh ! T’as pas vu… ? Ici… en bas de l’écran ? C’est… « Carré blanc » !)
Les autres. Oyez ! Oyez ! Les autres ! Tous les autres… depuis l’âge de 13 ans ! Ap-p-p-p-prrrooochez ! Venez tâter la peur ! La sueur froide ! Laissez-vous gagner par la frayeur « sans risque » … dans votre fauteuil, ô mes douillets ! Ha ! ha ! ha ! ha !... Dans cette rubrique cela gicle rouge de sang ! Venez ! Venez ! Plus près, Mademoiselle ! Oui, messieurs, mesdames, vous en aurez pour votre argent ! Entrez ! Entrez ! C’est croustillant ! Émoustillant ! Vous serez bien contents ! Succès garanti ! Brrr… et miam, miam ! Là ! Oui ! Argh ! Ha ! ha ! ha ! ha ! ha ! Miam !
Ici ? Oh, oh ! L’on a du crime et des larmes…
Et puis, peut-être, peut-être… pour finir : DU CHÂTIMENT ! Peut-être… une tête qui tombe ? Une tête… ou deux !, qui sait… ? Miam, miam, approchez. Entrez. Laissez-vous tenter. Déjà cela frémit, dans le pot.
Ho ! Ho ! N’en laissez pas une miette ! Pas une goutte ! Régalez-vous, mes gourmets !
Ici ? Des coups de surin, l’on a !
Eh ouais ! Hé… L’on est au… cinoche ! Non… ?
Silence dans la rue… ; poussière de lumière
Blême des astres ; lune ; et maigre réverbère…
Sous le soulier vernis et qui craque mais luit
Tout de même, c’est le «mac-à-dam(e)s» dans la pluie…
On est au dix-neuvième, ou tout début vingtième ;
Tout est noir, tout est gris, et c’est la fin d’un monde :
ON EST AU CINÉMA ! ... ; on est là dans la ronde
Morbide des sabbats, quand des corps mous s’y aiment !
SILENCE DANS LA RUE – à peine un brin de pas !...
Poussière de lumière… à blêmir, quant aux crimes
De l’ange Lucifer…, lui, le PORTEUR D’APPÂTS…
Silence dans la rue, avant que ne s’escriment
LA LAME AVEC LA CHAIR… »
… Mais aussi ! Mais aussi ! Oyez ! Oyez !
… Des coups de fusils ! La forêt. Sombre. Sombre.
Sûr ! Mais aussi, plus étrange… Vous en aurez, dans cette tranche, pour votre fringale de mystère, également, mes affamés !
… Ici ? L’on a de l’entomologie dense ! Et cela danse ! : ici ça vole !, ça grouille !, ça fourmille ! Fly ! Fly ! Flying ! Fly ! Pilou, pilou !
fffffffffffffffuuiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiitttttttttttt [bruit de vent]
… L’on aura – vous aurez, verrez ! – des mouches ! par milliers ! Des nuages d’ailes : mais de quelles mouches s’agit-il, au vrai ?
Mouche dorée ? Mouche verte : Lucilie ? La mouche du vinaigre ? (qui adore la rosée : la drosophile !). Mouche charbonneuse (stomoxe) ? Mouche à miel ? Mouche de la viande ? La tsé-tsé : la glossine ?
… Ou bien la mouche domestique, ce diptère familier qui nous, nous chatouille le nez ou le cou n’est-ce pas ?, mais pas – cela est à noter – le nez, le cou, et tout le reste d’ailleurs, d’un bien curieux personnage : l’on a nommé Piero les-deux-avions-blanc ! (Patience ! mes chers amis, patience ! Vous l’allez bientôt connaître : il est au centre de l’affaire qui va ici nous occuper tout au long des quelque neuf ou dix épisodes qui nous séparent de l’épilogue. Et tout vrai ! Véritable ! Avéré. Vérifié. Vous y êtes ? … Vous y serez croyez-nous !)
Bref. Donc, outre ces mignonnes bestioles noires qui vous viennent boire l’eau de vos fontaines – ô public ! tu l’auras expérimenté, bien évidemment -, vos fontaines ! : votre sueur !, à chacun de vos pores !, toi et toi et toi et toi et aussi toi !, là, derrière le pilier !, mon amour !, toi qui te grattes… - pourquoi ?, hum ?!
Bien, donc, outre la commune mouche domestique, l’on va trouver dans ce récit plus vrai que nature, myriades de mouches vertes : mouches à merde !, quant à elles…
Mouches, vertes, bleues, par milliards de milliards ! Et n’oublions pas, l’ombrageux Taon, le vorace, le bouffeur de sang ! Et pompe !, pompe ! Hardi !, pompe ! tes litrons de globules. D’Hémoglobine. Argh…
… Ainsi que flots de miel. Abeilles. Du miel ; et du lait. De l’humide. Du curé !!! De la cure. Dans des caves, mes amis ; dans des caves ! Du curé en cave ! De la vie. De la mort aussi, rassure-toi, ô avide de faits divers ! De l’ignoble, bien baveux ! Oh oui, oh ! Oh, là, là ! Oh, oh !
… De la peur épaisse. Crasse. Rien que pour toi !
Ah ! Régale-toi ! Tiens ! Prends ! Telle l’hostie ! Communie ! Ouvre bien large ton bec, Corbeau ! L’hostie !!!
Cette hostie-ci… C’est la tienne !
Vois ! Ta peur ! Dans ces colonnes ! Rien que pour toi seul… Mon chéri. Mon assis. Mes douillets. Votre peur ? Buvez-là ! Vous êtes là pour ça non ?!...
Vous avez payé… pour trembler ; non ?! De tout temps, pas vrai ?! »
JADIS, LA PEUR…
Jadis elle venait errer sous vos fenêtres.
Vous la reconnaissiez : elle portait vos dents.
En un rictus vengeur elle portait vos lèvres.
Elle avait votre voix dans votre gorge en sang.
Et c’était votre cri
Strident qui vous cuisait.
Elle avait tout de vous CAR C’ÉTAIT VOTRE PEUR
Incarnée en un double de vous : votre corps
Et votre âme – spectre et miroir – ; votre sueur
En denses gouttelettes dansant là dehors
Et mêlées à la pluie
Et qui s’y confondaient.
(Philippe baudet)