LES BABAS ET LES CHOUX DE CHEZ NOUS (+ C'EST TOUT VU : Philippe Baudet, 2019)

Posté

Les “babas et les choux” de chez nous

(Allègre allégorie !)

 

1

 

Ignorez-vous donc, malheureux, malheureuse, que vous vous trouvez à… l’intérieur (moite sans doute, mais…) d’un conte ! Ni plus ni moins.

Alors… bercez-vous d’illusions tant qu’il vous plaira ; mais ne vous y croyez pas pour de vrai, en ce lit chaud ; où la matière lisse, se fait lisser. (À bon entendeur salut.)

 

Quand on parvient directement à “l’étal du haut”, coloré et doux, si doux, ici, en notre conte à nous donc, c’est un peu comme si l’on tombait en arrêt, foudroyé, ravi oh oui, face à la devanture d’une somptueuse pâtisserie tout compte fait. Un peu, oui. Mais “un peu” seulement, attention ! Car un gouffre insondable, infranchissable, séparent à jamais ces deux univers de délectation là.

On explique… Ils sont, les miam-miam faramineusement délicieux, déployés, çà et là, dans les magnifiques pâtisseries de la fameuse, réjouissante, régalante rue Fauche-Girard de la bonne ville de Bordeaux. Bon. C’est ainsi. Ils sont, les miam-miam sublimissimes, déployés plus précisément, derrière la vitrine bien évidemment, derrière la vitrine des meilleures pâtisseries de la ville : meilleures pâtisseries qui se trouvent presque toutes être, comme d’ailleurs - va savoir pourquoi, par tradition sans doute - la plupart des boutiques de très grande qualité, les magasins de très grand luxe itou, situées dans cette rue-là, précisément : rue Fauche-Girard. (Alors on ne s’étonnera pas, dans ces conditions, que la plus réputée d’entre elles, à juste titre l’on s’empresse d’ajouter, la toute première parmi les toutes premières des pâtisseries de Bordeaux elle-même y soit : Galier & fils, voyons !) Bref. Nous étions en train de tenter d’expliquer à notre public que les mirifiques miam-miam de haut vol déployés dans les vitrines des pâtisseries de la rue Fauche-Girard, l’étaient, en fait… déployés… pour les seuls yeux ! Pas pour le nez !, pas pour la langue !, remarquons bien. Non !, l’on ne peut ni goûter ni humer ni lécher en faisant de ce lèche-vitrine pour fine gueule là.

Ils sont présentés, donc, ces appas-ci : les miam-miam de si bon aloi, au tout devant, pour émoustiller le chaland : passant qui passe, promeneur flânant sur le large trottoir - oh, trottoir fort bellement aménagé, tiens, tiens ! - de la rue… Fauche-Girard bien sûr ; passant, sifflotant peut-être, comme ça, l’air de rien, innocent en somme, quoique avec les sens affûtés, hé !, avec les sens frémissants, ho ! ; passant, qui marche lentement, lentement, voire très lentement, au pas même l’on peut dire ; qui va, va… en palpant quand même de temps en temps, mmm !, en palpant… avec son œil aux aguets, ce que proposent en devanture les marchands de toutes sortes. Ceux tout particulièrement des métiers de bouche, et notamment ceux qui ont l’art de faire monter la sève, l’art d’aiguiser l’appétit à cette heure avancée de l’après-midi. (Vous savez, à cette heure fatidique où l’on se sent pousser “un petit creux”, là, dans le ventre ; quand le repas de midi se fait quelque peu lointain et que celui du soir tarde. Sur le coup des 16 ou 17 heures par-là.)

Or… C’est dans ces eaux-là, eh oui !, que, oh, oh, comme par hasard devant cet étal-ci, de chez Galier & fils justement, au cœur de l’après-midi par conséquent, « sous le soleil exactement » peut-être ; oui… c’est dans ces eaux-là que, scotché subitement en pleine rue, stoppé net quoi !, pour ne pas dire tiré : chtac ! - comme à la chasse -, notre passant sans défense… flanche ! Ouais ! Notre passant à nous, celui-là, yes ! (appâté tel un poisson hypnotisé d’un coup par l’asticot joufflu qui se tortille langoureux sous ses ouïes… rien que pour lui, lui le brochet !), ses mirettes – celles de notre passant, pas celles du poiscaille ah çà ! - soudain happées, l’eau – réflexe pavlovien ou quoi ? - lui venant (abondante salive) à la bouche.

Hé, hé !... Miam, miam, miam !

Derrière la vitrine de la grandiose pâtisserie Galier & fils, tels des nababs, des pachas au lit, ces sont des ribambelles de girondes friandises, somptueuses, plantureuses, paresseuses, coquines, enrobées façon rebondies meringues de chez Fanny, qui lui sourient à notre passant désarmé, béat.

Curieux face-à-face. Pas banal pour le coup. Eh !... C’est qu’en cet étal-là, de chez Galier & fils, ce sont mille et un gâteaux amoureusement disposés sur le présentoir de la vitrine qui se vautrent sous son nez à lui le passant qui passait par ici ; sous son nez à lui, et à nul autre n’est-ce pas. (Du moins le croit-il…)

Ô prodiges ! Ce sont… gonflés superbement, maints et maints dorés choux à la crème à tire-larigot qui s’offrent et babas au rhum en veux-tu en voilà qui s’exhibent ! Aguicheurs, racoleurs.

Oui. Juste derrière la glace de la vitrine, c’est une multitude provocante qui se pavane en effet. Belle ô combien ! Les pâtes juteuses y paraissent comme accolées, les flancs sucrés s’y révèlent superposés l’on dirait quasi… Mais non ! : c’est tout bonnement leur nombre qui trompe. Qui le trompa, le passant éprouvé par quelque supplice de Tantale. Leur nombre, à ces gâteaux exorbitants, moelleux tellement sans aucun doute possible et, mon Dieu ! craquants au-delà du… comment dire ? du…, houlà ! Cela lui semble évident, maintenant, au flâneur devenu en un rien de Galier & fils avide, rendu vorace… par ses yeux exorbités comme ceux d’un spectateur de cinéma se persuadant qu’il détient, dans la salle obscure, le pouvoir de toucher avec la main des Gene Kelly et des Fred Astaire voltigeant sur l’écran – alors que… objectivement… on sait bien, nous, hein… bon… Mais oui ! c’est leur nombre même qui lui donna la berlue au baguenaudeur brusquement éberlué. Mais plus encore, c’est… surtout… surtout… c’est son vif désir d’eux qui le mit dans tous ses états !, et lui fit prendre des vessies pour des lanternes n’est-ce pas. C’est cette soudaine, inattendue – encore que secrètement espérée peut-être ? -, violente, brutale faim d’eux ! Une faim d’eux… proche de… la concupiscence, non ?, dès lors que tout son être ne fut plus que papilles gustatives au garde-à-vous devant ces sirènes ; dès lors que tout son être ne fut plus que sens aspirés par le spectacle de ces promesses ; plus qu’appétence paroxystique ; plus que sensualité exacerbée ; plus que baiser de limace aspirée, ventouse, par la peau de la vitre.

Non mais ! En voilà des façons ! Oh, oh ! Halte là ! Tout doux, gentilhomme ! Quels sont ces grossiers comportements de soudard !  

…Quoi qu’il en soit, ces euphories pâtissières de chez Galier & fils, ces littéralement inouïes, ex-tra-or-di-nai-res pâtisseries, à croquer très lentement, en prenant bien son temps à chaque bouchée afin de permettre au palais véritablement connaisseur d’en bien goûter toute l’extatique saveur si longue en bouche, ces pâtisseries, à sucer très, très lentement là encore afin que s’en libèrent tous les arômes, chaque atome de bonheur, ici, dans tout l’être réveillé désormais ; quoi qu’il en soit, donc, hélas pour les gloutons, pour les goujats, tant mieux pour le respect des bonnes manières, ces délectations pâtissières de chez Galier & fils sont fort heureusement protégées des doigts trop pressés, trop prompts, des langues indélicates, des dents enfin !, par une épaisseur de verre… à l’épreuve des balles au moins !

Allons !, cher Monsieur… Il faut d’abord pousser la porte doucement, et avec tous les égards qui lui sont dus s’il vous plaît !, chez Galier & fils. Et puis… il faut montrer patte blanche ici. Ne surtout pas se précipiter pour entrer dans la boutique. Parler posément, poliment ; voire avec élégance si possible. Attendre son tour sans faire montre d’impatience. Enfin… désigner les désirées ou les désirés avec tact ; en en vantant l’éclat unique ; ainsi qu’en vantant par là même le génie de leurs créateurs : les artisans-pâtissiers de chez Galier & fils. Cela, tout en sachant se faire humble soi-même devant tant de beauté, tant de talent. En restant digne cependant ça va sans dire. Et pour finir délier sa bourse bien sûr. Déverser son or posément. Sans donner la fâcheuse impression qu’on vous arrache le cœur, la moelle, les os. Ne pas non plus donner trop l’impression à la caisse que l’on se fait voler en somme. (« Non mais ! Des prix pareils pour de simples friandises ! ») Ne pas regarder à la dépense quoi ! (Parce qu’elles le valent bien, ces… friandises-là, précisément celles-là, oui, ces œuvres d’art de la pâtisserie.) Remercier pour ce somptueux paquet tendu vers soi avec grâce. Saluer ostensiblement ; tout en se montrant reconnaissant envers le personnel du privilège qui nous a été fait en ces lieux. Un large sourire avant de quitter la célèbre boutique n’est pas déconseillé. S’en retourner dans la rue d’un pas aristocratique quand on le peut rajoute à la majesté de la scène. Fait oublier que ce commerce entre honnêtes gens, est aussi… un commerce… banalement… mercantile, au fond. Tout de même. N’est-il pas… ?

(« Ho !, l’on n’est pas des sauvages quand même !, chez les becs fins ! »)

 

Mouais… Admettons…

Bref… De toute façon… Puisque l’on s’est avancé si loin… maintenant… dans cette voie-là… Reprenons à notre compte l’allégorie, oui, “des babas au rhum et des choux à la crème”, là-bas, dans la rue Fauche-Girard par exemple : pourquoi non ?, c’est une rue, c’est LA rue, pour les vrais gourmets. De même que pour, éventuellement, oh, très éventuellement, les simples gourmands ? Bah… à la rigueur ! Bien que pour ces derniers il y ait des lieux plus adaptés à leur qualité moindre n’est-ce pas, des lieux d’ailleurs beaucoup moins onéreux, et où ils pourraient, l’on pense – ces personnes en question n’étant manifestement guère des hédonistes au goût très fin, guère des connaisseurs confirmés hum ? -, y trouver, en ces lieux de seconde main, pour ne pas dire “de seconde zone”, leur content, sans se ruiner et… sans y voir pour autant de grande différence peut-être ; enfin, l’on ne voudrait pas préjuger non plus, hein : après tout, le vulgaire goinfre y pourrait là, ma foi, faire sa mue après tout, se transformer par la grâce d’une “révélation inattendue”, en…  Esthète du goût, ha, ha ! – ça s’est déjà vu, cela, oui ; du moins il nous semble nous rappeler de quelque affaire de ce genre, jadis.

Mais… Passons ! Assez perdu de temps avec de telles peccadilles ! Qui par trop encombrent les textes, même les mieux tenus jusque-là ; n’êtes-vous pas d’accord ? Si ? Bon !

 

…Alors, voilà. On vient de le voir, c’est grâce à eux, les babas dégoulinants de rhum, les choux à la crème bien en chair, boursouflés : très efficaces gâteaux pour ouvrir l’appétit des petits et des grands, que l’on rentre sur-le-champ dans la pâtisserie.

Et… Cependant… Quand on est dans les lieux mêmes… Eh bien… Ma foi… Ce sont parfois d’autres merveilles pâtissières que l’on s’achète en fait, pour finir.

Eux, les babas et les choux à la crème, attirent. (Tel l’asticot de tout à l’heure, en quelque sorte.) Mais ce ne sont pas forcément, pas fatalement, eux, les… mangés, au bout du compte.

 

Oui… d’accord… C’est là une comparaison qui paraît valable ; recevable possiblement, pour ce qui nous concerne nous, chez nous, en notre conte. Avec ce que l’on y peut trouver quoi.

 

Cela dit… À une gigantesque différence près !

 

En effet… Comment dire ? Heu… Confronté aux innombrables gâteaux exposés dans l’antre du pâtissier, l’amateur alpagué, une fois qu’il a franchi le pas de la porte, une fois qu’il est dans la place en somme, n’aura pas, de fait, contrairement à nous, ici, la possibilité de tout dévorer de ce qui s’y trouve de gourmandises. Non. Au plus… quatre ou cinq d’entre elles – et encore, pour les moins désargentés, sinon les plus affamés.

Et puis, même si…, même si…, d’aventure…

Bah, allez, imaginons-le, l’impossible. Imaginons un instant la scène. Poussons le bouchon jusqu’à l’absurde… euh, rien que pour la tâter de visu – ou presque -, la démonstration, n’est-ce pas ? Hum, oui, alors voilà… Z-y êtes ?

 

Bon… Donc… Même si l’inconscient gaillard boulimique, inventé de toutes pièces, l’on vous rassure, y vidait, là, afin de s’empiffrer comme nul jamais avant lui ne s’est empiffré depuis que le monde est monde, y vidait, pour s’en remplir, tout le contenu de la boutique…  Alors, mes agneaux ! gare ! gare ! Barrez-vous de devant le hardi !, de devant le courageux insensé, désormais… plein à craquer du bide ! Car, ce fou… cette… grenouille-montgolfière plus très fière - ni très fraîche d’ailleurs -, risquerait fissa de vous dégueuler ses boyaux distordus dessus, risquerait de vous gicler à la tronche… des flots de bile de son foie plus hypertrophié que la grenouille de la fable elle-même - du sieur Jean de la Fontaine -, ô passants ! Et vous !, pauvres de vous !, vous risqueriez de crouler, vous écrouler, sous la montagne ruinée, sous les ex-jolies-câlineries-sucrées… devenues immondes immondices carrément ! Et, pour finir, le Pantagruel, le Gargantua, de vous venir mourir dessus !, ô passants ! Berk !

Eh ben !

Alors là, c’est sûr, l’on n’en est pas là !, çà non !, ici… chez-nous, dans notre maison à nous, où il fait si bon, si chaud. En notre conte à nous, où tout n’est que lumières et fééries. Nous n’en sommes pas encore là on le répète. Non. Et, là, nous n’y serons peut-être jamais d’ailleurs. Espérons-le en tout cas !

 

…À l’étal du haut, cet étal mystérieux, particulièrement coloré et doux, si doux, ô tellement ! que les autres étals, du bas, du milieu, le jalousent, se rebiffent, se fâchent… et nous crient : « Hé, c’n’est pas juste !, c’n’est pas d’jeu ! Venez donc mater un peu ici, aussi !, messieurs, mesdames ! On a de quoi “faire voir”, nous, et tout autant si ce n’est plus que ce que l’on vous fait miroiter en haut ! 

- Patience !, qu’on leur répond. Patience !, chers étals du bas et du milieu, nous viendrons, oui, soyez sans crainte. Car nous sommes bien convaincus qu’en effet, chez vous autres, en vos antres, en vos étals respectifs, l’on a à coup sûr de quoi se régaler également. Mais… Permettez qu’on reste en haut encore un peu : c’est si joli ici, si joli, tout partout ; c’est douillet comme tout. Et puis… Et puis… La dégustation vient à peine de commencer ! »

 

…L’heure – l’on veut dire “l’instant” - viendra à point nommé. Surgira peut-être tout d’un coup de la boîte, tel le diablotin monté sur ressorts. Une pulsion qui sait, et nous voilà descendant quatre à quatre l’escalier des divins plaisirs. Une pulsion qui sait, et tout à trac, nous voilà-t-y pas rendus, hop !, à l’étal du milieu. À l’étal du bas.

 


 

2

 

Ce fut un brouhaha énorme, gai, une fête immodérée, ici, en notre conte à nous.

 

Chez nous, dans notre maison l’on peut dire.

Ou tout comme, puisque l’on y est reçu… “à bras ouverts” n’est-ce pas !

 

Un conte… aux trois étals : celui du haut bien sûr, mais aussi celui du milieu et celui du bas.

 

…L’on s’attarda même davantage, à ce que d’aucuns prétendent, à l’étal du milieu qu’à l’étal du haut : cet étal, souvenez-vous-en, qui semble fait pour attirer en premier le curieux, oui, qui semble fait pour attirer vers lui, tout un chacun et toute une chacune des visiteurs, visiteuses – dont nous-même en l’occurrence -, s’invitant là, en cet éblouissant conte qu’est notre conte à nous ; et ce avec le même pouvoir de fascination, d’envoûtement qu’exercent sur les badauds, les vitrines de la rue Fauche-Girard, à Bordeaux. Oui, le même effet !, le même attrait que sur les promeneurs de la rue Fauche-Girard dites voir ! (Ah, la fameuse rue Fauche-Girard… Avec son point culminant : chez Galier & fils évidemment !) Promeneurs qui sont alors… heu… qui se transforment en… Eh oui !, promeneurs qui deviennent… heu… comme… comme… des mouches… grimpant au miel ! Bigre !

 

Ah bon ? Une toile d’araignée donc ? Çà alors ! … Et qui sont par conséquent les gobe-mouches en cet attrape-couillons ? Hein ?

 

Enfin… Comparaison n’est pas raison n’est-ce pas ? Pas forcément.

Bref, faut voir cela de près. À la loupe ho ! Avec rigueur.

Et non au jauger vague ; à la louche… comme pour l’à-peu-près. Comme pour la soupe : l’instant-sploutch !

 

Eh ! l’on vous laisse en juger sur pièces.

Sans rien vous cacher de la coulisse. Voyez plutôt !

…Pour ce qui nous concerne nous en tout cas, ici, dans notre conte à nous, les mêmes commentateurs que tout à l’heure, au paragraphe précédent, prétendent encore que “l’agitation gastronomique” - pour mieux dire : “l’effervescence gastronomique” ! - qui régna à l’étal du milieu… ne serait rien, ouh là là !, comparée à “l’ivresse frénétique de consommation insatiable” qui s’empara des nuées voraces fondant sur l’étal du bas !

Toujours est-il que c’est ce que ces diablotins-là soutiennent mordicus.

 

Ma foi ?

…Moi ? Pour ma part, je ne saurais vraiment départager.

Qui serait médaille d’or ici, qui d’argent, qui de bronze ?

Bah… Je dirais simplement, quant à moi, que dans les trois, les trois étals n’est-ce pas, du haut, du milieu et du bas, l’on s’y régala… “à égalité” disons. Quoique différemment ça va de soi. L’on s’y pourlécha oui – et pendant longtemps ! - les babines, de ces si abondantes et si variées fééries qui y trônent, en ces trois étals-ci ; alléchantes ô combien ! Toutes !

…L’on s’en mit jusque là pour sûr. Avec délice, enchantement, ravissement extrême. Longtemps oui. Longtemps… de cette délicieuse matière qui diffuse sur la langue du gourmet un long temps de tendre souvenir de délectation - mmm… - ; et aussi comme un certain goût de revenez-z-y… à cette matière lisse qui se laisse, là, miam ! miam ! lisser à souhait.

…Quant à savoir lequel des trois étals remporta les lauriers, lequel fut lanterne rouge, ça n’a guère d’importance tout compte fait, puisqu’aucun des trois n’a démérité, puisque tous les trois se sont couverts de gloire – ce soir-là où j’y fus du moins…

 

*

Quoi qu’il en soit, apparemment…, de haut en bas et de bas en haut en passant par le milieu du conte, de notre conte à nous hein ! … eh bien tout fut consommé jusqu’à plus soif, jusqu’à plus faim. Alors… ?

(Tout fut consommé… mais bien entendu, tel le phénix, tout renaquit dès le lendemain soir !)

 

C’est, ceci, d’ailleurs, la consommation intégrale comme la régénération intégrale je veux dire, est plus un fait avéré qu’une hypothèse. Un fait, une réalité que tout le monde a pu constater de visu. En tout état de cause, l’imaginaire semble bel et bien en effet… “immortel”, en somme. Une chair somptueuse qui, profuse, se meurt chaque nuit sous la dent et le feu de l’incendié qui en lèche de cette chair-là : une chair qui, quand elle a du talent, tel le Génie d’Aladin quand il sort de sa lampe, embrase les esprits et les corps.

Un fait, oui, que nul ou nulle ne s’est aventuré(e), jusqu’à présent, à contester.

Bref, c’est quasiment… une certitude absolue.

N’en déplaise aux mécréants de tout poil…

 

Tout fut consommé donc, dans notre conte à nous. Toutes les denrées les plus rares. Toute la multitude merveilleuse. De A à Z. Ce fut « l’extase langoureuse » pour tous les convives. Et cette multitude merveilleuse là, sublime en diable, en riait aux éclats, d’être ainsi “dévorée” de la tête aux pieds. Voilà !

 

Et personne n’a été malade, notez bien ! Non !

Nul besoin de citrate de bétaïne ici, en notre conte, ha, ha !

 

…C’n’est pas comme là-bas, rue Fauche-Girard, avec l’histoire, l’allégorie rappelez-vous, de la pâtisserie – l’on veut dire la boutique ! Entière ! Son contenu quoi ! (Pas son contenant bien entendu !) Même si… provenant de chez Galier & fils tout de même ! : la Rolls-Royce des gâteaux, ho !

 

 

(À suivre… peut-être ; peut-être pas…)

(Philippe Baudet, novembre 2012)